08 août 2006

Soyons Fidel…


L’annonce d’une maladie de Jens Stoltenberg ferait-elle la une des journaux ? Même si c’était grave, ça ne vaudrait jamais qu’un entrefilet respectueux dans les pages diplomatiques. Qu’on se rassure, Jens Stoltenberg semble en excellente santé. Il est toujours premier ministre d’un grand pays d’Europe, la Norvège. Cependant, dans les jeux radiophoniques ou autres, la question ‘‘Qui gouverne la Norvège ?’’ serait classée ultradifficile. On applaudirait le candidat capable de répondre immédiatement Jens Stoltenberg. Idem pour le roi Harald V, connu des seuls lecteurs de Point de vue – Images du monde. Ils savent eux, que le roi de Norvège a été hospitalisé l’an passé, pour une maladie moins grave que celle dont souffre Fidel Castro. Pourquoi la sténose aortique d’Harald V, successeur d’Olav V, a-t-elle moins d’importances que les douleurs intestinales du président cubain ?

La Norvège est un grand pays, pour son pétrole et ses saumons fumés. Pourtant, son souverain et son Premier ministre sont bien moins connus que Fidel Castro. C’est le mystère de Cuba. Ernesto Guevara vivait en Argentine, l’un des plus grand pays de la planète. S’il était devenu médecin de quartier à Buenos-Aires, ou même professeur de médecine, personne n’en aurait jamais entendu parler. Le Che (à ne pas confondre avec Chevènement) a connu la gloire en quittant l’Argentine pour Cuba, alors connue pour ses tripots et ses bordels. Hemingway y allait pour le rhum, Simenon pour les putes, Graham Greene pour l’atmosphère trouble, idéale pour les romans d’espionnage. Puis Castro a triomphé de la poignée de policiers et de soldats du dictateur Batista ! Il est entré à La Havane, en janvier 1959, avec ses maquisards barbus juchés sur des chars. On pouvait croire à une révolution d’opérette, à un communisme enfin ludique, arrosé de rhum dans la fumée des cigares. Mais la révolution cubaine est devenue la hantise des Etats-Unis. Le monde a frisé l’apocalypse pour quelques fusées soviétiques installées sur l’île. Le pays le plus puissant de la planète aura passé près de cinquante ans à chercher les moyens de renverser le président Castro. Débarquement raté, complots, tentatives d’assassinat : le Lider maximo a résisté à tout. L’U.R.S.S. s’est effondrée (quoique !), aucun régime communiste d’Europe ne lui a survécu. Mais, le communisme cubain, lui, n’a pas disparu dans la tourmente.

Castro, est, certes un dictateur. Les opposants sont en prison, la police chasse toutes les déviances politiques, et… même sexuelles. La direction communiste elle-même a connu des purges à répétition, des procès fabriqués, des exécutions. Mais l’Amérique Latine n’a jamais su menacer Cuba de contagion démocratique. La propagande anticastriste manque de crédibilité quand elle est menée au nom des droits de l’homme sur le continent des escadrons de la mort, des coups d’Etat et des élections truquées. Les Etats-Unis n’ont cessé de dénoncer la dictature de Castro. Mais c’est Allende, président chilien démocratiquement élu, qu’ils ont abattu, et ils ont couvert les meurtres perpétrés au Chili par le général Pinochet. Le peuple cubain souffre, lui, de la pauvreté, générée par l’économie bureaucratique et accentuée par le boycott américain. Il ne rêve pas pour autant de la ‘‘liberté’’ du marché qui prévaut à Haïti ! Il se peut que le régime ne survive pas à Fidel Castro. La Havane retrouvera alors son ancienne splendeur, les exilés de Miami assureront la réouverture des casinos et des bordels. Le FBI s’inquiètera du narcotrafic. On se demandera alors comment ce petit pays, voué à êre un paradis touristique, a pu connaître une telle gloire. Mais, de Kennedy à Bush, tous les présidents des Etats-Unis, en agitant l’épouvantail, on fait de Fidel Castro un héros planétaire. La vedette américaine du communisme…

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